
Un petit pas pour les femmes
Pardon, j’ai mal entendu, pouvez-vous répéter? Oh! Le record est fixé à 29 %. Ah oui, seulement. Ce qui est à peu près la moyenne dans les assemblées législatives des provinces et territoires du Canada. Hum. Bon. Je peux aller ranger mes confettis et mon mirliton, en fait. Ce n’est pas demain la veille que nous vivrons dans «le monde d’après», celui où tout ira bien.
Pourtant, on était plutôt bien parties : en 2013, le Canada comptait six femmes à la tête de ses provinces. Et maintenant, combien? Zéro. Pas une. Comme dans les années 50. Et 60. Et 70. Et 80. Parce que oui, il a fallu attendre 1991 pour qu’une femme occupe le poste de première ministre d’une province ; il s’agissait de Rita Johnston, en Colombie-Britannique. Mais bon, ne blâmons pas nos aïeux : ce n’est pas comme si l’on faisait mieux maintenant.
Qui pensera à nos stationnements?
Ne pourrions-nous pas aspirer à des gouvernements qui nous ressemblent? Des lieux de pouvoir dirigés par des personnes qui nous comprennent et qui savent de quoi on parle quand on essaye d’expliquer que nous, ce qu’on aimerait, c’est de la lumière dans les ruelles sombres la nuit et des policiers formés à l’accueil des victimes de viol. Que c’est bien beau de construire un nouvel oléoduc, mais qu’on préfèrerait vraiment un investissement dans les structures d’accueil pour les enfants. Et des trottoirs plus larges pour que les poussettes puissent y passer (parce qu’en 2020, c’est toujours aux femmes qu’incombe principalement ce type de tâches).
Dans son livre Lean In, Sheryl Sandberg, la directrice des opérations de Facebook, explique qu’une de ses premières actions a été de réclamer des stationnements juste en face du bureau pour les femmes enceintes. Une demande qu’on lui a très vite accordée : tout le monde était d’accord sur le bienfondé de sa requête. C’est juste que personne n’y avait pensé avant.
Et oui, c’est vrai, toutes les femmes ne militent pas pour l’avortement, et encore moins pour l’égalité salariale. Obtenir plus de femmes dans les instances politiques ne signifie aucunement que les droits des femmes y seront davantage abordés.
Mais je ne parle même pas de féminisme ici. Juste de démocratie.
Des gens qui nous donnent envie de nous intéresser à la politique, parce que leurs discours sont différents, vivifiants et novateurs.
On parle souvent du désintérêt des jeunes pour la politique. Mais les jeunes ne se désintéressent pas de la politique. Ils se désintéressent des politiques, hommes et femmes, qui ne leur ressemblent pas.
Aujourd’hui, il est grand de réenchanter la politique, comme on dit. D’être un peu naïve, comme moi, peut-être. De s’étonner haut et fort du peu de place faite aux femmes sur les listes électorales. Du peu d’efforts réalisés par les différents partis pour inverser la tendance. Et de s’engager.
Déclaration d’intérêts : Julie Gillet est nouvellement directrice du Réseau féministe du Nouveau-Brunswick. Ses chroniques dans Francopresse reflètent son opinion personnelle et non celle de son employeur.